LIVRE V
DE L'EXECUTION DES DECISIONS
TITRE I
DES DISPOSITIONS GENERALES
Article 545 :
(1) Les Présidents des Cours et Tribunaux doivent s'assurer de l'exécution des décisions et ordres de leurs juridictions.
(2) Les ordres et décisions judiciaires d'arrestation, de détention ou de mise en liberté sont immédiatement exécutoires, à la diligence du parquet qui les transmet directement aux autorités chargées de leur exécution.
(3) Le Ministère Public et les parties poursuivent, chacun en ce qui le concerne, l'exécution des décisions devenues irrévocables.
Article 546 : Il est institué au greffe et au parquet de chaque juridietion, un regi' d'exécution des décisions judiciaires.
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Article 547 : Sous réserve des dispositions des articles 545 (2) ci-dessus et 22 du Code Pénal, une décision est exécutoire lorsqu'elle n'est plus susceptible ni d'opposition, ni d'appel, ni de pourvoi en cassation, le tout, sauf disposition contraire de la loi.
Article 548 : En cas d'erreur matérielle n'affectant pas la substance d'une décision, mais entravant simplement son exécution, la juridiction auteur de cette décision est saisie aux fins de rectification.
Article 549 :
(1) Lorsqu'une partie estime qu'une disposition d'une décision est obscure ou ambiguë, elle peut, par requête adressée au Président de cette juridiction, demander l'interprétation de cette disposition.
(2) La juridiction procède à l'interprétation en se référant aux seuls motifs de la décision.
(3) Le pouvoir d'interprétation ne permet pas de modifier la décision.
Article 550 : Les demandes de rectification ou d'interprétation prévues aux articles 548 et 549 ne peuvent être formées contre les décisions frappées de recours.
TITRE II
DE L'INCARCERATION
Article 551 : Toute personne détenue en vertu d'un mandat de justice est incarcérée dans une prison.
Article 552 : L'exécution des réquisitions de transferementou des mandats d'extraction est assurée, soit par la police ou la gendarmerie, soit par l'administration pénitentiaire.
Article 553 :
(1) Les inculpés, les prévenus et les accusés détenus provisoirement sont incarcérés <4ms un quartier spécial séparé de celui des condamnés et sont soumis, autant que possible, au régime de l'emprisonnement individuel. Ils sont, s'ils le désirent, employés aux travaux d'entretien de la prison.
(2) Les effets personnels des détenus sont laissés à leur dispositions, sauf décision contraire, soit de l'autorité pénitentiaire, dans un souci d'ordre, de sécurité ou de propreté, soit de l'autorité judiciaire dans l'intérêt de l'information judiciaire.
Article 554 : Le régime de l'emprisonnement se substitue de plein droit à celui de la détention provisoire dès que la décision de condamnation est devenue irrévocable.
Article 555 :
(1) Les condamnés à une peine privative de liberté sons répartis dans différentes catégories de prisons.
(2) Les conditions d'exécution des peines privatives de liberté sont définies par un texte particulier. Elles doivent tenir compte de la nature de l'infraction, du quantum de la peine, du sexe, de l'âge, de l'état de santé mental ou physique et de la conduite du condamné, de manière à concilier la nécessité de la réinsertion sociale de celui-ci et les impératifs de la discipline.
TITRE III
DES CONDAMNATIONS PECUNIAIRES
CHAPITRE I
DE L'EXECUTION DES CONDAMNATIONS PECUNIAIRES
Article 556 :
(1) Les amendes et frais de justice sont payés au Greffier en Chef de la juridiction qui a rendu la décision.
(2)
a) Avant le paiement, le Greffier en Chef délivre au condamné, sans frais, une copie de la décision contenant le décompte des amendes et fais de justice prévus à l'article 558 (2) a).
b) Après paiement :
i) il est délivré au condamné une quittance extraite d'un carnet à souches et, lorsque la décision est devenue irrévocable, une copie sans frais de ladite quittance ;
ii) le Greffier en Chef transmet au Ministère Public une copie du reçu dudit paiement et quand la décision devient irrévocable, un extrait de celle-ci ;
(3) Les intérêts civils sont recouvrés à la diligence de la partie intéressée à compter du lendemain du jour où la décision est devenue irrévocable.
CHAPITRE II
DE LA CONTRAINTE PAR CORPS
Article 557 : La contrainte par corps est une mesure qui vise à obliger le condamné à exécuter les condamnations pécuniaires ou à effectuer les restitutions ordonnées par une juridiction répressive.
Elle est applicable sans mise en demeure préalable, à la diligence du Ministère Public, en cas de non-exécution des condamnations pécuniaires ou de non-restritution des biens.
Elle consiste en une incarcération au cours de laquelle le débiteur est astreint au travail.
Article 558 :
(1) Lorsque la contrainte par corps concerne une personne déjà incarcérée ou détenue, elle est exécutée àl'expiration de la peine d'emprisonnement, à moins que cette personne ne fournisse une caution garantissant le paiement des condamnations pécuniaires dans les deux (2) mois de l'engagement.
(2)
a) La décision fixe le décompte des condamnations pécuniaires prononcées au profit de l'Etat ou de la partie civile, ainsi que la durée de la contrainte par corps y afférente, conformément aux dispositions de l'article 564 ci-dessus.
b) En cas de condamnations pécuniaires au profit de l'Etat, un mandat d'incarcération est immédiatement établi au prononcé de la décision et transmis pour exécution au Ministère Public.
c) En cas de condamnation au profit de la partie civile, et lorsque la décision est devenue définitive, un mandat d'incarcération est établi à la requête de cette partie civile, si elle n'a pas encore été désintéressée.
Article 559 : Tout condamné non détenu contre lequel un mandat d'incarcération a été décerné pour non-exécution des condamnations pécuniaires peut, soit en prévenir, soit en arrêter les effets en s'acquittant desdites condamnations.
Article 560 :
(1) Après exécution du mandat d'incarcération, le condamné peut demander la suspension de ses effets, en produisant une caution garantissant le paie ment des condamnations pécuniaires dans les deux (2) mois de la signature de l'engagement par la caution.
(2) Si, lors de son arrestation, le condamné offre une caution, l'officier de police judiciaire chargé de l'exécution du mandat entend ladite caution sur procès-verbal.
(3) Copie du dossier d'arrestation est transmise au Président de la juridiction ayant décerné le mandat d'incarcération et au Ministère Publique.
Article 561 :
(1)
a) Le Président du Tribunal de Première Instance du lieu de l'exécution statue sur l'offre par ordonnance et en Chambre du Conseil après l'audition du condamné et de la caution proposée.
b) Cette ordonnance n'est pas susceptible d'appel.
(2)
a) En cas d'acceptation, le Président explique à la caution les conséquences de son engagement et l'invite à signer un acte par lequel elle s' engage, à l'expiration du délai fIxé à l'article 5C?O, soit àsubir la contrainte par corps en lieu et place du condamné, soit à payer le montant fixé par la décision.
b) Après lecture et signature de l'acte d'engagement par la caution, le Président ordonne la mise en liberté immédiate du débiteur.
c) Si la caution ne sait pas lire, les dispositions de l'article 185 (1) b) sont applicables.
d) Notification de l'ordonnance est faite sans délai au régisseur de la prison et une copie est transmise au Président de la juridiction ayant décerné le mandat d'incarcération et au Ministère Public.
(3) Lorsqu'une caution n'est pas acceptée, le condamné peut en proposer de nouvelles et autant de fois qu'il le désire.
(4) L'incarcération intervenue à la suite du non-respect de ses obligations par la caution, ne peut cesser avant terme qu'après paiement intégral des sommes dues.
Article 562 : En cas de paiement partiel, la durée de la contrainte par corps est fonction du montant des sommes restant dues.
Article 563 :
(1) La durée de la détention provisoire subie par le prévenu ou l'accusé condamné uniquement à une peine d'amende est déduite de la durée de la contrainte par corps. Cette déduction est faite par le Présiderlt lors de la signature du mandat d'incarcération.
(2) Les dispositions de l'alinéa 1" du présent article ne s'appliquent qu'aux amendes et frais de justice.
Article 564 :
(1) En matière d'amendè et ddrais de justice, la durée de la contrainte par corps est fiée ainsi qu'il suit :
a) vingt (20) jours, pour les sommes n'excédant pas 10.000 francs ;
b) quarante (40) jours, pour les sommes supérieures à 10.000 francs et n'excédant pas 20.000 francs ;
c) trois (3) mois, pour les sommes supérieures à 20.000 francs et n'excédant pas 40.000 francs ;
d) six (6) mois, pour les sommes supérieures à 40.000 francs et n'excédant pas 100.000 francs ;
e) neuf (9) mois, pour les sommes supérieures à 100.000 francs et n'excédant pas 200.000 francs ;
f) douze (12) mois, pour les sommes supérieures à 200.000 francs et n'excédant pas 400.000 francs ;
g) dix-huit (18) mois, pour les sommes supérieures à 400.000 francs et n'excédant pas 1.000.000 de francs ;
h) deux (2) ans, pour les sommes supérieures à 1.000.000 de francs et n'excédant pas 5.000.000 de francs ;
i) cinq (5) ans, pour les sommes excédant 5.000.000 de francs.
(2) En matière de dommages-intérêts, les durées sont celles prévues à l'alinéa (1), réduites de moitié.
Article 565 : La contrainte par corps ne peut être exercée ni contre les personnes âgées de moins de six-huit (18) ans ou de plus de soixante (60) ans au moment de l'exécution, ni contre les femmes enceintes.
Article 566 : La contrainte par corps ne peut être exercée simultanément contre le mari et la femme, même pour le recouvrement des sommes afférentes à des condamnations différentes.
Article 567 : A l'expiration du délai de prescription de la peine, aucun mandat d'incarcération ne peut plus être décerné aux fins de recouvrement des amendes et frais de justice.
Article 568 :
(1) Aucun mandat d'incarcération aux fins de recouvrement des dommages-intérêts ou de restitution ne peut être décerné à l'expiration du délai de dix (10) ans à compter du lendemain du jour où la décision est devenue irrévocable.
(2) L'exécution d'un mandat d'incarcération décerné avant l'expiration du délai de dix (10) ans est poursuivie jusqu'àla prescription de la dette.
Article 569 : La contrainte par corps ne peut être prononcée contre :
a) les civilement responsables ;
b) l'assureur de responsabilité.
CHAPITRE III
DES EFFETS DE LA CONTRAINTE PAR CORPS
Article 570 : Les personnes détenues en vertu de la contrainte par corps sont soumises au même régime que les condamnés de droit commun.
Article 571 :
(1)
a) Le condamné qui a subi la contrainte par corps n'est libéré, ni des amendes et des frais de justice, ni des dommages-intérêts et restitutions pour lesquels la contrainte par corps a été exercée.
b) Le Ministère Public ou la partie civile peuvent à tout moment faire procéder à la saisie des biens mobiliers et immobiliers du condamné, à concurrence du montant de la créancer, conformément aux règles édictées en matière de saisies.
(2) Le délai de prescription de l'action prévu à l'alinéa (1) b) ci-dessus est de trente (30) ans. Il court à compter du lendemain du jour où la contrainte par corps a pris fin.
Article 572 : Lorsque la contrainte par corps a pris fin, elle ne peut plus être exercée pour la même créance.
TITRE IV
DU CASIER JUDICIAIRE
CHAPITRE I
DES FICHES DU CASIER JUDICIAIRE
Article 573 :
(1) ln est institué un casier judiciaire :
a) au greffe de chaque Tribunal de Première Instance ;
b) au Ministère chargé de la justice
(2) Le casier judiciaire institué au greffe du Tribunal de Première Instance est appelé fichier d'arrondissement et concerne les personnes nées dans le ressort dudit Tribunal.
(3) Le casier judiciaire institué au Ministère chargé de la Justice est appelé fichier central. Il centralise notamment :
a) les fiches du casier judiciaire des personnes de nationalité camerounaise ou étrangères nées à l'étranger
b) les fiches du casier judiciaire des personnes de nationalité étrangères nées au Cameroun, dont la naissance n'a pas été déclarée à l'état civil camerounais et qui résident au Cameroun ;
c) les fiches du casier judiciaire des personnes de nationalité camerounaise dont le lieu de naissance est inconnu ou dont l'identité est douteuse.
Article 574 : Losqu'une juridiction répressive camerounaise a prononcé une condamnation ou une mesure de sûreté, le Greffier en Chef de cette juridiction transcrit le dispositif de la décision sur une fiche appelée « fiche de casier judiciaire », établie en cinq (5) exemplaires.
Deux (2) exemplaires de cette fiche sont adressés au greffe du Tribunal de Première Instance du lieu de naissance du condamné pour classement à son casier.
Deux (2) exemplaires sontadressésau casier central aux fins d'un classement nominal et dactyloscopique, par ordre alphabétique.
Le cinquième exemplaire est classé au dossier de procédure.
Article 575 :
(1) Les exemplaires de la fiche adressés au fichier d'arrondissement et au fichier central portent, s'il y lieu, la mention de l'exercice des voies de recours.
(2) Lorsqu'une voie de recours a été exercée postérieurement à la diffusion de ces exemplaires, le Greffier en Chef de la juridiction qui a statué adresse une copie de l'acte de recours aux différents fichiers en vue de la mention visée à l'alinéa précédent.
Article 576 : Le casier judiciaire de chaque personne comporte autant de fiches que de condamnations ou mesures de sûreté prononcées séparément à son encontre par une juridiction répressive camerounaise ou étrangère.
Article 577 : La fiche de casier judiciaire comporte :
a) les renseignements d'identité, la photographie, les empreintes digitales et les signalements morphologiques et anthropométriques ;
b) les condamnations et mesures de sûreté prononcées par les juridictions répressives nationales ou étrangères ;
c) les condamnations pour contraventions ;
d) les mesures spéciales prononcées en application des articles 46, 48 et 49 du Code Pénal ;
e) les avis de recherche ;
f) les jugements déclaratifs de faillite ou de liquidation judiciaire ;
g) les décisions de grâce ;
h) les décisions de réhabilitation.
Article 578 :
(1) Sont retirées du casier judiciaire les fiches relatives aux condamnations ou mesures de sûreté annulées par une décision de relaxe ou d'acquittement devenue irrévocable.
(2) Il est de même des condamnations :
a) annulées à la suite d'une procédure de révision ;
b) effacées par l'amnistie ou la réhabilitation.
(3) Les fiches retirées du casier judiciaire en application des alinéas (1) et (2) sont classées aux archives du casier judiciaire. Aucune information ne peut y être puisée sans autorisation écrite du Ministère Public.
Article 579 :
(1) En cas de modification de la condamnation ou de la mesure de sûreté à la suite d'un recours, mention en est portée sur la fiche correspondante du casier judiciaire.
(2) Lorsque la modification ne laisse subsister qu'une peine accessoire ou une mesure de sûreté, une nouvelle fiche est établie mentionnant cette peine ou cette mesure, la fiche initiale étant retirée et classée aux archives du casier judiciaire.
(3) Lorsqu'à la suite de l'amnistie ou de la réhabilitation, une peine accessoire ou une mesure de sfireté subsiste, la fiche initiale est retirée et classée aux archives du casier judiciaire.
Article 580 :
(1) Des renseignements tirés des fiches, appelés « extrait de casier judiciaire», sont délivrés, sur leur demande, aux autorités administratives et judiciaires ou à la personne concernée, sous la forme d'un bulletin de casier judiciaire.
(2)
a) Le bulletin délivré par le Greffier en Chef du Tribunal de Première Instance est signé du Procureur de la République ;
b) Le bulletin délivré par le service central du casier judiciaire est signé du Ministre chargé de la Justice ou de son représentant.
CHAPITRE II
DES BULLETINS DU CASIER JUDICIAIRE
Article 581 :
(1) Il existe trois sortes de bulletins du casier judiciaire à savoir, le bulletin n° 1, le bulletin n° 2 et le bulletin n° 3 :
a) le bulletin n° 1 est un relevé intégral des fiches du casier judiciaire concernant une personne donnée. Il contient toutes les condamnations, mesures de sûreté et arrêté d'expulsion prononcées contre cette personne ;
b) le bulletin n° 2 comporte les mêmes mentions que le bulletin n° 1, à l'exclusion des décisions effacées par l'amnistie et la réhabilitation ;
c) le bulletin n° 3 n'est délivré qu'au titulaire du casier judiciaire. Il ne mentionne que les condamnations à des peines privatives de liberté non effacées par l'amnistie ou la réhabilitation. Il mentionne en outre toutes les condamnations relatives à la circulation routière.
Les bulletins n°s 1 et 2 sont délivrés aux autorités administratives et judiciaires sur leur demande.
(2) Lorsque le casier judiciaire est vierge ou que les condamnations et mesures de sfireté inscrites sur les fiches ne sont pas devenues irrévocables, le bulletin délivré porte la mention « néant,..
Article 582 :
(1) Toute personne qui veut faire rectifier une mention portée sur son casier judiciaire, adresse en double exemplaire une requête au Président de la juridiction qui a rendu la décision.
(2) Le Ministère Public a le droit d'agir d'office, dans la même forme, en rectification du casier judiciaire.
(3) Le Président statue en Chambre du Conseil après avoir entendu le requérant, le Ministre Public et toute autre personne dont le témoignage paraît utile.
(4) En cas de rejet de la requête, le requérant est condamné aux frais.
(5) Si la requête est admise, les frais sont supportés par le Trésor Public.
(6) Mention de la décision ordonnant la rectification est portée sur la fiche du casier judiciaire.
Article 583 : Les dispositions de l'article 582 sont applicables en cas de contestation sur la réhabilitation de droit ou l'application d'une loi d'amnistie.
(…à suivre)
Fait à Yaoundé, le 27 juillet 2005
Le Président de la République,
(é) Paul Biya